Alors que Biden est en difficulté sur de nombreux dossiers, il n’est pas illégitime de se demander s’il a bien la carrure nécessaire pour être le Président des Etats-Unis en 2022.
Les critiques des analystes politiques comme de la presse portent à ce stade avant tout sur les erreurs en matière de communication.
Elles sont souvent mises sur le compte des piètres qualités d’orateur du Président et sa propension à gaffer, ou plutôt à répondre un peu trop sincèrement ou candidement aux questions compliquées, par exemple sur l’Ukraine quand il annoncé qu’une petite incursion russe n’entraînerait pas forcément de réaction forte ou quand il a fait état de sa déception sur le caractère systématique de l’obstructionnisme des républicains au Congrès. Ces défauts ne surprennent guère les médias et observateurs, Biden ayant déjà eu les mêmes travers quand il était vice-Président de Barack Obama.
Ils étaient initialement vus comme le revers inévitable d’une certaine simplicité donnant à Biden l’image d’un homme politique qui parle vrai et qui comprend les américains ordinaires : il était le « regular guy » qui rentre tous les soirs chez lui dans sa petite ville du Delaware en prenant le train de banlieue depuis Washington. Autant d’atouts importants dans un pays où la classe politique est considérée comme totalement déconnectée des réalités. Ils sont désormais davantage perçus comme un handicap important du Président.
Mais la répétition d’erreurs de communication et surtout les difficultés rencontrées pour prendre la mesure du problème causé par l’inflation ou pour faire avancer son agenda politique conduisent peu à peu les observateurs à s’interroger plus largement sur la stature présidentielle de Biden.
Donald Trump et les républicains avaient fait en campagne en 2020 en mettant en doute très explicitement les capacités cognitives de Joe Biden. Ce dernier avait démontré lors des débats avec son adversaire comme lors des « town halls » où il s’était soumis aux questions des électeurs qu’il n’avait aucune difficulté en la matière. Il était même sensiblement plus cohérent dans ses interactions avec les journalistes ou les américains ordinaires que le Président sortant.
Mais c’est une chose d’être capable de mener campagne correctement, c’en est une autre d’affronter le rythme et les exigences du bureau ovale. Citons David Axelrod, stratège démocrate et ancien conseiller politique de Barack Obama : « j’ai vu des présidents bien plus jeunes que Biden vieillir très vite pendant qu’ils étaient à la Maison Blanche ».
Avoir été vice-Président permet d’être à l’aise dans la Maison-Blanche, mais il y aussi un écart entre être le super-conseiller politique d’un Président et devenir celui qui décide en dernier ressort.
On peut toujours mettre les difficultés de Biden sur le compte de circonstances adverses mais la capacité à s’adapter aux circonstances et à gérer les crises ne fait-elle pas partie des qualités première attendues d’un homme d’Etat ? Et c’est bel et bien la stature présidentielle et le leadership de Biden qui commençait à être mis en doute depuis quelques semaines.
Dans ce contexte, la bonne gestion, jusqu’à présent, de la crise en Ukraine, même si la communication n’a pas toujours été parfaite, a fait taire une partie des critiques1Evidemment pas celles des médias ultra-conservateurs. sur sa capacité à faire face à des situations exceptionnelles. Mais elle n’a certainement pas éteint les interrogations sur le style présidentiel de Joe Biden.
Première interrogation : sait-il bien s’entourer et ne s’est-il pas trompé dans la composition et l’organisation de son administration ?
Cette question est malheureusement trop rarement posée explicitement, aux Etats-Unis comme ailleurs, mais un Président ne peut pas tout faire tout seul et la capacité à bien choisir son entourage devrait être un critère d’évaluation majeur des compétences d’un dirigeant politique.
S’agissant de Biden, les critiques sur Kamala Harris cristallisent cette interrogation. La vice-présidente est très peu présente médiatiquement et peu à son avantage quand c’est le cas, avec des déclarations maladroites sur l’immigration alors qu’elle avait été chargée de la relations avec les pays d’Amérique Centrale par Biden. Elle semble un peu perdue et est finalement très peu utilisée par le Président, ce qui paraît étonnant puisque personne ne connaît mieux que Biden les difficultés mais aussi l’utilité potentielle de la vice-présidence. A moins que Biden ne regrette son choix ? Ce serait alors aussi son échec, puisqu’il avait pris beaucoup de temps à l’été 2020 avant de désigner l’ex-sénatrice de Californie2On ne peut exclure également que Kamala Harris ne soit pas aidée par les démocrates : un certain nombre d’entre eux n’ont pas forcément intérêt à la voir réussir, dans la mesure où cela la propulserait comme favorite pour l’investiture en 2024..
Au-delà de la vice-présidente, des questions se posent sur les « ministres ». Même si ceux-ci n’ont pas, aux Etats-Unis, le même poids politique ni la même exposition qu’en France (les sénateurs ont ainsi beaucoup plus de pouvoirs et de visibilité), ils pourraient servir de relais des messages présidentiels. Et si de nombres « ministres » s’activent ces jours-ci pour se déplacer sur le terrain vanter l’action présidentielle notamment sur la rénovation des infrastructures, aucun n’est vraiment présent dans les médias. Mauvais casting ou utilisation insuffisante du potentiel de certains d’entre eux ? Sans doute un peu des deux.
On peut ainsi constater que Pete Buttigieg, qui avait acquis un certain statut en jouant un rôle important lors de la primaire démocrate et désormais « ministre » des transports, est très peu mis en avant dans la communication de l’administration Biden alors qu’il pourrait par exemple utilement faire la promotion du plan de rénovation des infrastructures, d’autant plus qu’il est souvent considéré comme capable de « parler » aux électeurs indépendants ou conservateurs modérés.
De même, on voit très peu Jennifer Granholm ou Gina Raimundo, anciennes gouverneurs respectivement du Michigan et du Rhode Island, dont la nomination avait à l’époque été saluée, compte tenu de leur bonne réputation. Elles pourraient aujourd’hui jouer un rôle plus important, alors qu’elles sont respectivement « ministre » de l’énergie et « ministre » du commerce, deux thèmes particulièrement d’actualité dans le contexte de prix élevés de l’énergie et d’inflation.
Au-delà de desservir sa présidence, on peut y voir aussi un échec – qu’il est évidemment encore trop tôt de déclarer définitif – de la promesse de Biden de servir de pont avec la nouvelle génération du parti démocrate. A ce stade, les démocrates les plus médiatiques restent la nouvelle génération de l’aile gauche (Alexandria Ocasio Cortez et sa « bande ») ou les vieilles figures telles Bernie Sanders ou Elizabeth Warren dont on doute qu’elles représentent l’avenir du parti démocrate. Surtout, aucune figure modérée n’émerge dans le sillage du Président, alors que c’était sans doute un des objectifs de Joe Biden.
C’est aussi sur la garde rapprochée de Biden, ses conseillers et les personnes placées aux postes clé de l’administration que les regards se tournent de plus en plus3Rappelons que les Etats-Unis pratique le « spoil system », c’est-à-dire qu’après une élection présidentielle, de nombreux postes administratifs sont traités comme des postes politiques et font l’objet d’une vague de remplacements et de nominations proposées par le Président.. L’omniprésence d’ « anciens » des mandats Obama, voire Clinton, est particulièrement critiquée sur plusieurs plans.
Si les présidences Obama et Clinton ne sont pas généralement présentées comme des échecs, on ne peut pas dire qu’elles aient su régler les problèmes structurels des Etats-Unis censés être les priorités des démocrates (précarité, inégalités notamment raciales, etc.) ni empêcher l’émergence d’une colère dont l’élection de Trump et la division actuelle du pays sont les expressions évidentes. Leurs équipes à nouveau au pouvoir peuvent-elles faire mieux aujourd’hui, alors que le monde a changé et que les défis non résolus à l’époque sont encore plus cruciaux et difficiles ?
Ensuite, si Obama n’a toujours eu que des louanges pour Biden et le rôle qu’il avait joué, il est de notoriété publique que ses équipes ont toujours méprisé ce politicien à l’ancienne, un peu à l’écart de Washington (et qui n’est pas issu d’une université prestigieuse). On rapporte souvent que Biden n’était jamais invité aux événements conviviaux internes à la Maison Blanche. Les anciens des mandats Obama et Clinton qui occupent des postes « politiques » importants dans l’administration Biden respectent-ils vraiment le Président ? N’ont-ils pas un autre agenda en voyant plus loin ?
Alors que Biden souhaite réellement travailler avec l’aile progressiste du parti démocrate, il n’est pas certain que son équipe – au sens large – partage cette approche, entre anciens des équipes Clinton qui en veulent toujours à Bernie Sanders pour l’échec d’Hillary Clinton en 2016 et anciens des mandats Obama qui supportent mal le jugement pour le moins mitigé porté par les progressistes sur le bilan de celui dont ils veulent protéger le statut d’icône.
Dit autrement, Biden comme recours pour éviter un deuxième mandat Trump et comme Président de transition, d’accord – surtout en l’absence d’alternative crédible. Mais Biden qui redéfinit la politique extérieure américaine ou qui deviendrait le « nouveau Roosevelt » en accomplissant l’agenda social le plus ambitieux depuis plus de 50 ans, ce n’est pas forcément ce qu’imaginait l’appareil technocratique en place du parti démocrate.
La politique étrangère en est une bonne illustration. Les fuites rapportant un supposé « entêtement » de Biden à quitter l’Afghanistan malgré les conseils de son entourage proposant de prolonger la présence américaine démontrent une loyauté imparfaite, une réticence à remettre en cause les décisions passées mais aussi une contestation des orientations politiques de Biden.
La politique étrangère défendue par Biden et notamment la recherche de l’apaisement via la négociation et la coopération économique n’est pas du goût de la classe politique américaine (tous partis confondus) ou de l’appareil diplomatique américain, souvent partisan d’une logique d’affrontement pour maintenir l’hégémonie américaine. Mais le problème pour Biden apparaît surtout préoccupant quand on écoute les discours du secrétaire d’Etat Anthony Blinken, dont la tonalité rappelle bien souvent celle des faucons de la grande époque de George W. Bush.
Biden n’est évidemment pas totalement responsable des caractéristiques du vivier dans lequel il a eu à choisir ses collaborateurs et son gouvernement. Mais Anthony Blinken est un collaborateur de longue date (il était le conseiller diplomatique du vice-Président Biden) et on pourrait s’étonner de voir qu’il ne semble guère aligné sur la vision de la politique étrangère de son patron, ou tout au moins à l’unisson quand il s’agit de la présenter.
De même qu’il s’est sans doute un peu trop rapidement convaincu de sa capacité à trouver des compromis avec les républicains, Biden a peut-être été un peu naïf quant à la mobilisation de tout l’appareil démocrate derrière lui et pour mettre en œuvre ses orientations et n’a pas suffisamment préparé sa Présidence et la constitution de son équipe.
Ceci renvoie à la deuxième grande question : Biden est-il capable d’être le patron de son parti ?
Le Président est censé être le « boss », même si les grands élus démocrates au Sénat et à la Chambre ne manquent pas de pouvoir politique et d’influence. Ou plutôt, parce que les Congressmen et Congresswomen et notamment les sénateurs ont beaucoup de pouvoir, un Président ne peut réussir que s’il est considéré comme le patron incontesté de son parti.
Les doutes étaient permis lorsque Biden était devenu le champion des modérés puis au moment de son investiture comme candidat démocrate il y a bientôt 2 ans. Mais la façon dont il avait réussi à rassembler l’ensemble des tendances du parti rapidement au printemps après sa victoire lors de la primaire puis tout au long de l’été précédent la véritable entrée dans la campagne avait montré un certain savoir-faire et levé en grande partie les interrogations.
La question se pose à nouveau aujourd’hui, au regard notamment de l’impasse au Congrès dans lequel est le programme « Build Back Better ». Tout au long des débats internes sur le sujet, les démocrates n’ont jamais explicitement critiqué Biden (et les progressistes ont été remarquablement raisonnables dans leur communication). Mais ils n’en ont pas moins dans les faits remis en cause son autorité : entre refus des progressistes de voter le paquet « infrastructures » quand Biden a fini par renoncer à le lier à « Build Back Better », ou rebuffades des sénateurs modérés Manchin et Sinema, auxquels Biden n’aura jamais réussi à « tordre le bras ». Et jusqu’à la claque infligée par Joe Manchin, qui est certes un démocrate très atypique et particulièrement modéré, lorsqu’il annonçait en direct sur Fox News fin décembre qu’il ne voterait jamais « Build Back Better » après avoir fait mariner le Président pendant des mois.
Alors que les difficultés s’accumulent, sa marge de manœuvre pour imposer aux démocrates son agenda et sa méthode semble par ailleurs s’amenuiser.
A l’approche des élections de mi-mandat, ce sont les intérêts très concrets à court terme mais aussi à long terme des démocrates qui sont en jeu et certains considèrent qu’il est grand temps de reprendre les choses en main et de réorienter la stratégie démocrate et l’action de Biden. Les leaders démocrates au Sénat et à la Chambre des représentants ont déjà semble-t-il repris la main sur les sujets qu’ils mettent à l’ordre du jour, sans forcément faire des priorités du Président les leurs.
Cette difficulté à maîtriser la majorité démocrate au Congrès ne devrait pas faciliter la tâche du Président dans le mois à venir s’il veut continuer à miser sur sa capacité à rassembler le pays et à faire revenir certains élus républicains à la raison et à entrer dans une logique de compromis.
D’où la troisième question : Joe Biden est-il l’homme de la situation ? Sa vision de la société américaine n’est-elle pas décalée de la réalité politique du pays ?
Il se présentait comme capable d’unifier le pays, ou tout au moins de trouver des points d’accord entre démocrates et républicains pour sortir de la logique d’affrontement permanent qui empêche, concrètement, toute politique publique ambitieuse ou de long terme d’être mise en place. Et de fait, en raison de son passé politique et de sa conviction forte, il avait un bon profil pour réussir cette entreprise.
Biden a d’ailleurs sans doute raison quand il considère que la société américaine est en réalité majoritairement modérée, souhaite un débat politique moins polarisé et plus apaisé et aimerait que la puissance publique soit efficace.
Le problème, c’est que ce ne sont manifestement pas ces américains-là qui votent, avec pour conséquence que de plus en plus d’élus (côté républicains notamment, mais aussi côté démocrate) ne sont pas non plus partisans de l’apaisement mais plutôt de la polarisation politique et de la guerre culturelle et idéologique.
Le pari de la réconciliation politique tenté par Biden semble aujourd’hui bien parti pour échouer significativement, ce dont le Président est lui-même conscient. Lors de sa conférence de presse, Biden a reconnu avoir sous-estimé, quand il a été élu, l’obstructionnisme systématique dont feraient preuve les républicains.
« Je n’avais pas anticipé qu’il y aurait un tel effort constant [des républicains] pour garantir ce qui est le plus important pour eux, à savoir que le Président Biden ne puisse rien faire. Réfléchissez : en faveur de quoi sont les républicains ? En faveur de quoi ? Citez-moi une chose à laquelle les républicains sont favorables ? »
Joe Biden, lors de sa conférence de presse du 19 janvier, organisée pour faire le point sur sa première année de mandat.
Cette déclaration a fait couler beaucoup d’encre et marqué les esprits. D’abord parce qu’elle traduit une réelle frustration du Président, pour le moins justifiée, de voir que les républicains n’ont aucun autre agenda politique que celui de le voir échouer.
Ensuite pour ce qu’elle dit de la personnalité de Biden lui-même. Comment Biden, confronté pendant ses 8 ans de vice-présidence, à l’obstruction permanente des républicains qui n’ont jamais souhaité négocier avec Barack Obama (au point de lui refuser, en accord avec la lettre de la Constitution mais certainement pas avec l’esprit de celle-ci, le droit de nommer un juge à la Cour Suprême), pouvait-il être aussi naïf ? Est-il trop confiant dans son art du compromis ?4Certains ont suggéré que Biden avait exprimé sans s’en rendre compte un préjugé raciste, à savoir que l’obstruction républicaine est moins compréhensible envers un vieux Président blanc qu’envers un jeune Président afro-américain..
Certains – évidemment partisans d’une Présidence plus idéologique et plus combattive – ont vu dans cet aveu d’impuissance le fait que Biden était irrémédiablement dépassé par l’évolution des Etats-Unis au 21ième siècle. Pour ceux-là, les difficultés rencontrées par Biden sont le signe que la culture du compromis ou l’idée que le personnel politique doit être pragmatique et traiter d’abord les problèmes quotidiens des américains avant de lancer des batailles idéologiques sont des approches dépassées.
Même ceux qui auraient sincèrement souhaité que Biden réussisse dans son entreprise de rassemblement du pays et de retour à la normale, s’inquiètent de voir Biden persister dans son approche et du risque d’un échec qui remettrait en selle les républicains pro-Trump et ouvriraient la voie à un retour des ultra-conservateurs. Ils commencent alors à proposer de délaisser l’objectif de parvenir à des résultats concrets pour revenir à une campagne misant sur la polarisation politique, le combat idéologique (i.e. la « guerre culturelle ») et la critique des républicains, dans la perspective des élections de novembre5On reviendra dans une prochaine chronique sur la stratégie électorale qu’envisagent les démocrates pour ne pas subir une lourde défaite en novembre prochain..
Pourtant, lors de son discours sur l’état de l’Union, le 1er mars dernier, Biden a une nouvelle fois appelé au compromis, évité au maximum les polémiques et même pris des positions très modérées, en rejetant par exemple explicitement le slogan « defund the police » et en appelant au contraire à renforcer les moyens des forces de l’ordre. Au risque, quand il n’évoque pas les inégalités raciales, les violences policières ou la dette étudiante, de décevoir sa base militante.
Il a ainsi montré qu’il ne renonçait pas à son entreprise de rassemblement du pays – même si l’exercice assez convenu qu’est le « State of the Union » n’est pas forcément le moment plus adapté pour opérer un virage et se lancer dans une bataille politique plus idéologique.
Comme il l’avait fait pendant la campagne électorale, on lui saura gré de continuer à défendre ses convictions, à chercher à construire des ponts entre américains, en s’appuyant sur des sujets consensuels plutôt qu’à cliver, à miser sur le compromis davantage que sur la petite phrase ayant vocation à créer une polémique virale sur les réseaux sociaux, etc.
Et on reste convaincu que lorsque Biden aborde des sujets clivants pour une partie des républicains (comme la défense des droits des transsexuels, largement remis en cause récemment dans plusieurs états républicains, ou la fixation au niveau fédéral du salaire minimum à 15 dollars), ce n’est pas pour ouvrir un combat idéologique ou galvanisé sa base, mais parce qu’il est absolument convaincu du bien-fondé de sa position sur le sujet et du fait qu’elle correspond à une évolution nécessaire de la société américaine et souhaitée par cette dernière.
On se souvient qu’il avait, quand il était vice-président, annoncé être favorable au mariage homosexuel, avant même qu’Obama ne se prononce, déclenchant la colère des équipes de ce dernier. En réalité Biden voyait, dans son expérience quotidienne de la société américaine, que cette dernière était mûre pour cette avancée importante – alors que les stratèges du Président s’interrogeaient sur cette question et traitaient la question sous un angle beaucoup plus politicien.
C’est d’ailleurs ce mélange de conviction, de pragmatisme et de culture du compromis qui est séduisant chez Joe Biden et qu’on aurait bien aimé voir réussir.
Mais on a peut-être assisté lors du discours sur l’état de l’Union aux derniers feux de cette approche politique, à court terme, tant la pression pour un changement de stratégie en vue des élections de mi-mandat va être forte.
Et peut-être même à plus long terme, puisqu’une défaite de Biden en novembre pourrait bien sonner la fin, en pratique, de sa Présidence puisqu’il serait à la fois privé de leviers d’action et très affaibli en interne. Il risque bien de toute façon d’être affaibli politiquement même si les démocrates sauvent les meubles en novembre prochain au prix d’une campagne clivante et bien différente de celle que le Président aurait souhaité mener.
Biden voulait renvoyer le mandat Trump à une parenthèse dans l’histoire politique américaine. N’est-ce pas son propre mandat et sa tentative de « retour à la normale » qui sera, malheureusement, considéré comme une parenthèse ?