A moins de 50 jours de l’élection, les sondages restent inquiétants pour Trump, nettement devancé par Joe Biden

Si Donald Trump continue d’afficher une confiance inébranlable et de se glorifier de l’enthousiasme suscité par sa campagne et ses meetings, les sondages – qu’il conteste vigoureusement (on y reviendra dans une prochaine chronique) mais regarde tout aussi attentivement – restent nettement en sa défaveur, alors qu’il ne reste plus que six semaines avant l’élection. Joe Biden possède une nette avance dans la très grande majorité des sondages – dont on peut trouver une compilation brute ici.

Le site de référence FiveThirtyEight1538 correspond au nombre de membres du collège électoral qui désigne le Président, puisqu’on rappelle que l’élection présidentielle relève d’un suffrage indirect. estime, sur la base d’un traitement des différents sondages disponibles état part état, que sur les 20 états dans lesquels les deux candidats ont peut-être une chance de gagner, Biden progresse partout, à l’exception du Missouri (qu’il n’a de toute façon que très peu de chance de gagner) et de la Floride, étant dans lequel les deux candidats seraient désormais au coude à coude.

Au final Biden est donné gagnant dans presque tous les « swing states », ces états « bascules » qui votent tantôt démocrate, tantôt républicain et qui déterminent le résultat final de l’élection présidentielle.

Et lorsque les analystes font des projections et des scénarios sur la carte électorale, le résultat reste très favorable à Biden : il regagnerait, à ce stade, la plupart des états dont la perte avait scellé le sort d’Hillary Clinton (Michigan, Wisconsin, Pennsylvanie, etc.), serait très peu menacé dans des états que Trump imaginait peut-être conquérir (Minnesota par exemple), et gagnerait même potentiellement des états sans lesquels Trump peut difficilement espérer gagner (Arizona, voire la Caroline du Nord et même, donc, la Floride).

Les écarts se sont parfois un peu resserrés depuis fin août (comme c’est le plus souvent le cas lorsque l’élection se rapproche) mais cela efface seulement les progrès de Biden en début d’été. Le rapport de forces présenté par les sondages est au final très similaire à ce qu’il était en juin, ce qui pourrait paraître surprenant compte tenu des événements multiples intervenus, entre les manifestations « Black Lives Matter », le regain de la pandémie ayant interrompu en juillet la reprise « normale » des activités, les conventions démocrate et républicaines, l’intensification de la campagne de terrain côté Trump, qui multiplie les meetings (le plus souvent sur des tarmacs d’aéroport2Sans qu’on sache si cela répond à des considérations pratiques ou parce qu’il aime à se faire filmer devant l’énorme avion présidentiel.), l’entrée dans la dernière ligne droite début septembre, les polémiques multiples autour du Président, etc.

Autrement dit, le Président n’a pas coulé et à même arrêté le début de chute libre qui le menaçait fin juillet mais il est très loin d’avoir réalisé la « percée » dont il semble, si l’on se fie aux sondages, avoir impérativement besoin pour pouvoir gagner le 3 novembre prochain.

La remarquable stabilité des sondages va de pair avec le fait que le nombre d’électeurs indécis est très réduit : selon les sondages, ils sont entre 5 et 10% dans la plupart des sondages (15% au maximum) alors qu’ils étaient 20% à la même époque en 2016. Il convient de préciser à ce stade que la présentation des sondages aux Etats-Unis est différente de celle adoptée en France : elle est transparente sur le pourcentage d’électeurs indécis (ce qui explique fait que le total des % des candidats en présence n’atteint pas 100%).

Dans un pays très divisé sur le plan politique, les électeurs potentiels se sont déjà fait leur opinion sur les deux candidats. Il faut dire qu’on peut difficilement imaginer deux candidatures plus opposées3Si on met de côté le fait que ce sont deux hommes blancs de plus de 75 ans.. De surcroît,les deux sont déjà bien connus du grand public avec des images bien installées (le businessman macho et anti-système provocateur d’un côté, l’homme politique sympathique et ultra-classique de l’autre).

Alors que habituellement, au moins un des deux candidats bénéficie d’une faible notoriété en début de campagne et qu’un des leviers, pour les deux campagnes, réside dans la construction de l’opinion que se feront les électeurs de ce candidat, la marge de manœuvre en la matière est plus limitée cette année, même si l’absence de scrupules côté Trump et le pouvoir des réseaux sociaux peuvent malgré tout lui permettre de jouer cette carte contre Biden – et il y compte bien !

Autre signal préoccupant pour la campagne Trump, les enquêtes qui comparent l’appréciation portée par les électeurs sur les candidats sur différentes thématiques d’actualité (par exemple celle de Fox News révélée le 13 septembre). Elles sont aussi remarquablement stables depuis plusieurs mois, et traduisent le fait que les efforts de la campagne Trump pour mettre en avant son bilan ou diaboliser le candidat démocrate est son programme n’ont pas fonctionné.

Sans grande surprise, Biden est donné nettement en avance pour ce qui est de la capacité à gérer la question des inégalités raciales. Il l’est aussi, ce qui est sans doute une déception pour Donad Trump, s’agissant de la capacité à gérer la pandémie, malgré les efforts de la campagne Trump pour valoriser – éhontément – l’action du Président en la matière.

Surtout, Biden est considéré, certes de très peu, comme le mieux à même de gérer les questions d’insécurité et de maintien de l’ordre, ce qui est très préoccupant pour Trump, qui a mené une offensive massive sur ce terrain depuis l’affaire George Floyd et encore plus depuis la convention républicaine et les incidents de Kenosha et Portland fin août, quitte à utiliser des spots de campagne particulièrement anxiogènes et mensongers sur la position de Biden relativement à la police4On en a déjà parlé à plusieurs reprises : malgré les dénégations répétées de Joe Biden, Trump et son entourage continuent d’affirmer que Biden veut baisser le budget des forces de l’ordre..

Il ne reste plus que le sujet économique sur lequel le Président est jugé comme légèrement meilleur que son adversaire, mais là encore sans que le Président ait accentué son avance, malgré sa communication optimiste sur la reprise de l’économie et ses « actions » (en réalité d’une portée limitée) pour soutenir l’économie.

Plus inquiétant encore pour le camp Trump, la popularité du Président – c’est-à-dire la proportion d’Américains approuvant son action (voir par exemple Gallup, créateur de cet indicateur) est remarquablement stable depuis plusieurs mois et n’a que très rarement dépassé 45% depuis son élection5Elle s’est simplement rapproché des 50% pendant quelques jours au tout début de la pandémie..

Or, au-delà du fait que ces taux de satisfaction ressemblent à ceux de Jimmy Carter ou George H.W. Bush lorsque ces deux présidents républicains sortant ont été battus, les experts estiment que ce paramètre est très important et prédictif du potentiel électoral d’un Président sortant. Si Trump n’a jamais réussi à avoir une majorité d’Américains satisfaits de son travail au cours de son mandat, comment pourrait-il obtenir une majorité de voix pour être réélu ?

Même si Trump avait gagné en 2016 en obtenant au niveau national 3 millions de moins de voix qu’Hillary Clinton, les experts relient notamment ce plafonnement de son taux de popularité au score réalisé actuellement par Trump dans les sondages nationaux mais aussi dans les « swing states » les plus disputés : il ne dépasse presque jamais, en pratique 45% d’intention de vote.

Autrement dit Trump bénéficie certes d’un soutien indéfectible et non négligeable de sa base et on pourrait considérer que le fait d’avoir maintenu un taux de satisfaction à hauteur de 40% environ malgré une gestion catastrophique de la pandémie, un crise économique, une crise sociale et des manifestations historiques et des polémiques permanentes est un motif d’espoir pour Trump.Mais il fait face dans le même temps à une opposition très forte et bien ancrée6Un sondage mené par l’Université de Siena pour le compte du New York Times montre par exemple que 45% des personnes interrogées dans le Wisconsin ont un avis très défavorable sur le Président, et seulement 8% un avis plutôt défavorable.. Ce chiffre de 45% semble bien être un plafond difficile à surmonter.

Pendant ce temps, malgré la présence d’indécis, Joe Biden parvient à dépasser dans certains sondages nationaux ou des certains « swing states » 50% des intentions de vote et plus de la moitié des américains ont de lui une opinion plutôt favorable (cf. le sondage de Fox News précédemment cité par exemple).

Ceci est évidemment d’autant plus un problème pour le candidat Trump qu’il ne peut pas espérer bénéficier de la présence d’autres candidats et candidates qui pourraient siphonner les voix de son adversaire, comme cela avait été le cas en 2016, où près de 6% des électeurs n’avaient voté ni pour Trump, ni pour Clinton, ce qui fait qu’il avait gagné six états sans y avoir obtenu plus de 50% des voix. Les sondages montrent d’ailleurs que ces électeurs « non Trump non Clinton » pencheraient assez nettement cette année à ce stade pour un vote Biden7Selon des données du Pew research center citées par le Cook Political Report, une newsletter de référence en matière d’analyse politique..

Enfin, les sondages plus détaillés sur certains segments de la population montrent que deux catégories d’électeurs sur lesquelles Trump et les conservateurs comptaient lui échappent à ce stade : les personnages âgées et les électeurs des banlieues résidentielles.

Ainsi, alors que Trump avait nettement gagné dans le segment démographique des plus de 65 ans en 2016, de nombreux sondages (par exemple les sondages de Quinnipiac ou de Monmouth, qui font partie des « bons » instituts de sondage) donnent à ce stade de la campagne Biden devant Trump au sein de ces électeurs, voire avec une nette avance.

La campagne Biden semble avoir réussi son pari de mener une campagne très active envers cet électorat – cf. par exemple ce spot télévisé mettant en avant l’impact de la pandémie, ou les protestations virulentes contre la volonté du Président de puiser dans les ressources allouées au financement public des pensions de retraite pour financer des mesures de soutien de l’économie. Il apparaît désormais clair que leur opinion très négative de la gestion de la pandémie l’emporte sur d’éventuelles craintes relatives à l’anarchie, malgré les efforts du Président pour attiser cette crainte.

De la même façon, les électeurs des banlieues résidentielles de classe moyenne, et notamment les électrices (cf. par exemple ce sondage national réalisé fin août ou un sondage réalisé début septembre en Pennsylvanie qui attribue l’avance de Biden dans cet état clé au soutien des électeurs de banlieue) semblent pencher pour Joe Biden.

La pandémie semble là encore jouer un rôle important pour des parents obligés de garder leurs enfants, qui craignent pour leur emploi ou qui doutent de leur capacité à financer des soins médicaux en l’absence d’assurance santé suffisante. On considère souvent que ce sont les craintes relatives aux assurances santé et la volonté de Trump et des républicains de remettre en cause l’ObamaCare qui a conduit les banlieues résidentielles à voter démocrate lors des élections de mi-mandat de 2018, donnant ainsi au parti démocrate la majorité à la chambre des représentants.

Biden a ainsi dépensé de façon importante pour des spots sur l’assurance santé diffusés dans les « swing states » ou pendant le lancement de la saison de football américain (un des sports favoris des les banlieues résidentielles), tandis que son adversaire continue8Il avait déjà annoncé en 2017 et à nouveau en 2019 qu’il allait annoncer de façon imminente un projet d’assurance santé « phénoménal ». à dire qu’il a sous la main une proposition de réforme de l’assurance santé, sans être capable d’aller au-delà des déclarations d’intention et alors même que son administration mène un contentieux auprès de la Cour Suprême pour démanteler l’ObamaCare.

En attendant, malgré les appels du pied de Donald Trump, anxiogènes quasiment racistes (quand on parle de « ménages pauvres » qui « envahiraient » les banlieues, il faut comprendre « ménages afro-américains »…) sur le risque que représente Biden pour les banlieues, le Président n’a pas réussi à entamer l’avance de son concurrent sur cet électorat.

S’agissant des performances des deux candidats dans les différents segments de l’électorat, la seule bonne nouvelle pour Donald Trump vient des sondages relatifs au vote de la minorité latina.

A ce stade, Donald Trump réaliserait en effet un meilleur score qu’en 2016, aussi surprenant que cela pourrait paraître au premier abord compte tenu de ses prises de position sur l’immigration ou sur les inégalités raciales (on tentera de se pencher sur la question complexe, de l’avis même des sondeurs, de l’électorat latino dans une prochaine chronique). Les sondages donnent d’ailleurs le Président en meilleure position qu’il y a quelques semaines en Floride, et même au coude à coude avec Joe Biden dans le Nevada, état normalement acquis pour les démocrates.

Le Président présente ces sondagesCette fois-ci sans les critiquer… comme un signal d’un regain d’intérêt pour sa campagne et comme la preuve d’une adhésion nouvelle des minorités (y compris afro-américaine et sur ce point il va sans doute un peu vite en besogne…) à sa candidature.

De leur côté, les démocrates s’inquiètent sérieusement sur ce sujet, conscient d’une part que l’électorat latino avait massivement voté pour Bernie Sanders lors de la primaire et d’autre part qu’il a peut-être été un peu trop négligé par Joe Biden depuis quelques mois. Ils vont donc manifestement mettre le paquet sur cet électorat dans les semaines à venir (ils ont déjà commencé à diffuser plus massivement des spots en espagnol).

Car les moyens dont dispose la campagne Biden pour mener campagne sont une autre mauvaise nouvelle pour le Président : il n’a finalement pas d’avantage financier sur son adversaire.

Tout le monde pensait il y a quelques mois que son budget de campagne serait nettement supérieur à celui de Biden, ce qui obligerait ce dernier à faire des arbitrages et choisir sur quels états il ferait porter son effort9Comme il l’avait fait pendant la primaire démocrate, faisant l’impasse, faute de moyens et réseau local suffisant, par exemple sur le Nevada. Cela ne l’avait d’ailleurs pas empêché de gagner lors du Super Tuesday des états dans lesquels il n’avait en pratique pas mené de campagne dédiée.. Mais le candidat démocrate a enregistré une collecte de fonds record au mois d’août (plus de 360 millions de dollars !) et il disposerait désormais des fonds supérieur à ceux restant à son adversaire10Lequel a nié avoir des problèmes financiers et évoqué l’idée de puiser sur ses deniers personnels en cas de besoin..

Biden n’a donc en pratique pas vraiment de limitation budgétaire pour faire campagne dans l’ensemble des états clés, d’autant que Michael Bloomberg a annoncé le 13 septembre, respectant ainsi (partiellement, vu ses moyens financiers) sa promesse de tout faire pour battre Trump même s’il n’était pas investi par le parti démocrate, sa décision d’investir 100 millions de dollars dans la campagne électorale en Floride, notamment pour tenter de lutter contre une éventuelle érosion de Biden dans l’électorat latino.

Dernier élément en défaveur de Trump : le temps qui passe, forcément à l’avantage du candidat en tête. Certains électeurs ont déjà commencé à recevoir leur bulletin de vote par correspondance, certains états ont commencé à ouvrir des bureaux de vote le 18 septembre.

Le vote anticipé et le vote par correspondance devraient d’ailleurs augmenter nettement cette année, compte tenu des craintes qu’ont les électeurs, en période de pandémie, de devoir affronter de longues files d’attente le jour de l’élection avec un nombre de bureaux de vote réduits par la pandémie (les images de certaines primaires au printemps dernier ayant frappé les esprits).

Les démocrates (non sans arrière-pensées compte de l’avance actuelle de leur candidat) et les exécutifs locaux chargés d’organiser les élections – tout au moins ceux qui tentent de le faire de façon neutre et avec l’idée d’offrir à tous ceux qui le souhaitent la possibilité de voter dans de bonnes conditions, ce qui n’est pas le cas partout, inquiets que l’augmentation forte du vote par correspondance et du vote anticipé ne viennent compliquer les opérations de dépouillement et la divulgation d’un résultat stabilisé rapidement après la fermeture des bureaux de vote, insistent d’ailleurs sur la nécessité de voter aussi tôt que possible pour être sûr de voir sa voix être prise en compte.

Or depuis bientôt deux semaines, si Trump est comme d’habitude au centre de l’actualité, il a subi cette actualité plus qu’il ne l’a façonnée et s’est retrouvé en position défensive, au lieu de pouvoir porter ses messages.

En effet, plusieurs polémiques successives l’ont obligé à répondre à des critiques virulentes et ont détourné sa communication (et même celle des médias d’ultra-droite qui sont venus à son secours) du sujet de l’insécurité, qu’il comptait mettre au cœur des débats durablement.

La première provient d’un article de The Atlantic dénonçant, sur la base de propos rapportés par des sources non révélées, le mépris que porterait le Président envers les anciens combattants et notamment les anciens prisonniers de guerre, qu’il aurait traité de « losers » et « suckers » (c’est-à-dire « ratés » et « idiots »), ou les blessés et mutilés, qu’il ne souhaiterait pas voir apparaître sur les images des cérémonies militaires auxquelles il assiste.

La deuxième fait suite à la parution du livre du journaliste vedette Bob Woodvard11Associé à Carl Bernstein, il avait révélé en 1972 l’affaire du Watergate qui conduira en 1973 à la démission du Président Nixon. C’est le personnage incarné par Robert Redford dans « Les Hommes du Président ».. L’ouvrage est basé sur 18 entretiens avec le Président (enregistrés et mis à disposition de la presse par Woodward) au cours desquels ce dernier aurait notamment indiqué, dès le mois de février, à son interlocuteur que le vaccin était très dangereux.

Ceci pose évidemment des questions sur de nombreuses déclarations postérieures ou concomitantes dans lesquelles Trump minimisait la gravité du virus, refusait d’encourager les mesures de distanciation sociale, ou sur sa volonté de continuer à tenir des meetings devant une assistance nombreuse12Encore dans le Nevada, malgré les interdictions édictées par le gouverneur, le 13 septembre., etc. Dans ces mêmes entretiens, Trump explique qu’il a volontairement minimisé le risque, pour éviter de « paniquer » la population.

On pourrait rajouter à cela les manœuvres du ministère de la Justice pour éteindre une plainte pour viol formulée à l’encontre du Président, ou les allégations d’un lanceur d’alerte sur des consignes politiques demandant aux services de renseignement de minimiser les éléments recueillis sur des tentatives d’interférences russes dans la campagne électorale.

La Présidence Trump a depuis son commencement était marquée par des polémiques permanentes, par des révélations plus choquantes les unes que les autres sur le Président ou son entourage, etc. Mais le Président était souvent lui même à l’origine de ces polémiques, pour faire la une (ou pour chasser de celle-ci une précédente polémique embarrassante), et une partie de ces polémiques, sur des sujets toujours clivants, pouvaient lui rapporter des voix (on peut penser par exemple à celle sur la destruction de statues de personnages emblématiques de l’histoire des Etats-Unis).

Cette fois-ci, Trump est totalement sur la défensive13Même s’il est bien sûr le premier responsable car ce sont sa conviction d’être son meilleur avocat et son envie, malgré ses déclarations violentes contre les médias traditionnels, de plaire à ces mêmes médias, qui l’a fait accepter de tenir ses nombreux entretiens enregistrés avec une star du journalisme.. Et, même s’il conteste vigoureusement les allégations de l’article de The Atlantic14Il avait pourtant déjà déclaré en 2015, à propos de l’ancien candidat républicain à la présidentielle John McCain qu’il ne voyait pas pourquoi il était considéré comme un héros vu qu’il avait été fait prisonnier. et réinterprète et minimise les déclarations faites à Bob Woodward, aucune de ces polémiques ne peut lui rapporter des voix.

Au mieux, ses plus fervents supporters seront renforcés dans leur conviction que Trump est victime d’une nouvelle cabale médiatique. Au pire (pour lui…), elles peuvent encore détourner de lui certains électeurs ou conforter certains indépendants ou républicains modérés dans leur intention de voter Biden – lequel a bien sûr immédiatement utilisé les différentes révélations, pour sa campagne digitale par exemple).

Par ailleurs, la campagne Trump a peut-être perdu le momentum sur l’insécurité créé par la convention républicaine et va devoir de nouveau se battre sur le terrain de la pandémie, qui est justement celui que Biden veut mettre au centre du débat.

Tous ces éléments ne sont guère donc encourageants pour le Président sortant. Mais au-delà de la peur un peu irrationnelle d’un scénario à la 2016, les démocrates savent bien que rien n’est gagné et sont loin de considérer que la victoire est acquise.

D’abord parce que le camp Biden continue à s’en tenir à une campagne « en temps de pandémie », donc essentiellement virtuelle et sans beaucoup de contact sur le terrain, alors que du côté Trump on mène campagne « comme si de rien n’était », à coup de meeting et de porte-à-porte. Et personne ne peut dire aujourd’hui si cela a un impact et lequel, alors qu’on entre dans la dernière ligne droite.

Les démocrates vont-ils y perdre de précieuses voix faute de pouvoir atteindre certains électeurs indécis ou potentiellement abstentionniste ? Quant à la désinvolture de la campagne Trump par rapport à la pandémie, accrédite-t-elle l’idée que la pandémie relève du passé ou, au contraire, entretient-elle le sentiment que le Président ne fait rien pour protéger ses concitoyens ?

Surtout, une avance de 5 à 6% dans les sondages ne représente en réalité pas une marge suffisante, si on tient compte d’une marge d’erreur de 2%, d’une incertitude sur la participation liée à la pandémie et aux modalités de vote (les sondages indiquent très clairement que ce sont les électeurs démocrates qui craignent le plus la pandémie et qui auront recours au vote par correspondance). Donald Trump n’a peut-être en réalité qu’1 ou 2% des voix à gagner pour revenir dans la course et être réélu. Le peut-il et comment compte-t-il y parvenir ? On en parle dans la prochaine chronique.

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