Après les élections générales du 3 novembre, les républicains se félicitaient de leur stratégie électorale basée sur un soutien inébranlable à Donald Trump, malgré la tentation de lâcher un Président donné nettement perdant par les sondages : certes Donald Trump avait été battu, mais en obtenant un nombre de voix record pour un président en exercice et en attirant aux urnes un nombre impressionnant de supporters, lesquels avaient permis de préserver de nombreux sièges de sénateurs menacés et de réduire la majorité démocrate à la Chambre des représentants.
Dans la foulée, sans réel débat interne et sans hésiter, le parti soutenait le tentative de contestation des résultats par le Président sortant et continuait à miser sur l’aura de Donald Trump pour conserver la majorité au Sénat lors des deux élections sénatoriales en Géorgie programmées le 5 janvier. Mais les événements intervenus depuis dix jours pourraient bien renverser leur perception de cette loyauté aveugle envers Donald Trump1En tout cas, on l’espère..
Le parti a perdu la majorité au Sénat, après la victoire des candidats démocrates dans les deux scrutins qui se tenaient en Géorgie le 5 janvier. Les deux candidats républicains, de piètre qualité, ont mené une campagne maladroite (on pense aux attaques personnelles accusant Raphael Warnock d’être un gauchiste radical, peu efficaces dans un état du sud contre le révérend d’une Eglise évangélique – celle où officiait Martin Luther King Jr – très respectée en Géorgie2A l’image des vaines attaques menées par le camp Trump pour présenter Joe Biden pour un dangereux gauchiste.) et surjoué leur soutien indéfectible à Donald Trump.
Ce dernier aura d’ailleurs largement parasité le scrutin, utilisant le podium que lui procurait la campagne en Géorgie pour obtenir le soutien de ses supporters à sa croisade désespérée pour renverser le résultat de la présidentielle bien davantage que pour aider les candidats républicains. Si cela n’explique pas totalement la défaite, on peut quand même imaginer que laisser croire que Trump sera finalement désigné Président a atténué l’impact de ce qui était peut-être le meilleur argument électoral des républicains, à savoir la nécessité d’équilibrer les pouvoirs et donc de ne pas donner à Joe Biden le contrôle de l’ensemble du pouvoir législatif.
De même, en dénigrant les responsables des organisations en Géorgie, pourtant républicains, Trump a semé la zizanie au niveau local : outrés et lassés de se faire traiter par Trump de traîtres et de tricheurs, le « secretary of state » ou le responsable des élections ont multiplié les interventions publiques pour dénoncer l’attitude du Président et des candidats républicains qui avaient appelé à leur démission, au point de faire fuiter, à la veille du scrutin, l’enregistrement de l’appel téléphonique du Président leur demandant de trouver « d’une manière ou d’une autre » les bulletins qui lui manquaient.
Pendant que leurs adversaires s’embourbaient dans les polémiques sur les fraudes électorales et les chamailleries internes au parti républicain, les démocrates ont mené campagne sur les impacts directs du résultat, en expliquant par exemple qu’une majorité démocrate au Sénat voterait le « chèque » aux ménages de 2000 dollars que la majorité républicaine avait refusé fin décembre dans le cadre des mesures économiques post-Covid enfin adoptées après des mois de blocage.
Surtout les organisations démocrates locales3Autour de Stacey Abrams, déjà largement évoquée dans de précédentes chroniques., ont su reproduire la campagne de terrain très efficace qui avait permis à Joe Biden de remporter l’état en novembre et réussi à garder l’électorat démocrate très mobilisé – ils ont réussi à inscrire 75 000 personnes sur les listes électorales entre le 3 novembre et le 5 janvier (et l’écart entre les candidats, dans les deux scrutins, s’est révélé inférieur à 75 000 voix).
Sur le plan de la participation électorale, Trump a là encore nui à son propre parti. Marteler que les élections sont truquées, que le vote par correspondance et les machines électorales sont source de fraude et manipulées (alors que ce sont les deux seules modalités de vote en Géorgie) n’a sans doute pas aidé à mobiliser les électeurs qui adhérent aux théories conspirationnistes du Président.
En tentant d’outrepasser l’expression du vote démocratique pour se faire désigner vainqueur par la justice, le Congrès ou les organisateurs des élections, Trump, et dans sa foulée les candidats républicains, ont fourni un argument inespéré aux démocrates, qui avaient largement mené campagne auprès des habitants de Géorgie (et notamment des afro-américains) sur l’importance d’utiliser le droit de vote pour faire entendre sa voix.
C’est d’ailleurs le différentiel de mobilisation entre partisans démocrates et républicains qui aura été la clé du scrutin, les démocrates réussissant à maintenir une participation très élevée dans leurs fiefs et notamment dans l’électorat afro-américain. Pendant ce temps, malgré l’étiquette Trumpiste revendiquée par les candidats républicains, et malgré un dernier meeting la veille du scrutin, les électeurs du Président ne se sont pas suffisamment déplacé, notamment dans les zones rurales.
Et c’est ainsi que le « Trumpisme sans Trump » ne s’est pas du tout avéré une stratégie gagnante (on notera ainsi que le même jour que les élections sénatoriales se déroulait une élection pour un poste dans l’exécutif local… remportée par un candidat républicain ayant mené une campagne plus classique).
Dès lors qu’il ne s’agit pas de voter pour Trump lui-même, et même si les candidats martèlent son nom à chaque instant, un certain nombre d’électeurs MAGA se désintéressent du scrutin. Dans le même temps, certains républicains modérés, qui aimeraient bien tourner la page Trump, rechignent à voter pour des candidats affichant avec leur proximité avec le Président sortant. Et l’opposition au « Trumpisme », et pas seulement à Trump lui-même, semble au contraire motiver les démocrates.
En réalité, le problème pour les républicains est que Donald Trump n’avait que faire des deux scrutins tenus en Géorgie. On se demande d’ailleurs comment, avec 4 ans de recul sur le personnage, les républicains ont pu imaginer que Trump se mettrait, dans la foulée de sa défaite du 3 novembre, au service du parti pour préserver la majorité républicaine au Sénat, alors qu’il n’avait manifestement aucun intérêt direct à cela.
Mais la croisade désespérée de Donald Trump pour remettre en cause le résultat du scrutin présidentiel n’a pas seulement coûté, sans doute, aux républicains la majorité au Sénat. En trouvant son achèvement, si on peut dire, dans l’envahissement du Capitole le 6 janvier, elle a jeté le discrédit sur l’ensemble du parti et accentué les divisions en son sein.
Que l’on considère l’envahissement du Congrès comme une tentative de coup d’état, comme un nouvel avatar pour le moins problématique de la politique spectacle façon Trump, comme une expression de la progression inquiétante du complotisme dans la société américaine (on en parlait ici), comme la preuve de la capacité d’action des mouvements suprémacistes blancs ou comme un acte de colère nihiliste d’américains paumés et manipulés, c’est évidemment Donald Trump qui porte la plus grande responsabilité dans cet événement extraordinaire.
A-t-il vraiment cru qu’il pouvait renverser le résultat par une démonstration de force ? A-t-il voulu déclencher une insurrection ? Ou est-il simplement un enfant gâté mauvais perdant, enivré par son emprise sur ses supporters les plus fanatiques et sur le parti républicain et incapable de s’arrêter et finalement dépassé par des supporters qui l’ont pris au mot et des mouvements qui ne cherchent qu’un prétexte pour en découdre ? Difficile à dire à ce stade – et il n’est pas certain qu’on finisse par avoir une réponse claire à ces questions, malgré les procédures juridiques, y compris pénales, ou les enquêtes du Congrès qui risquent de se multiplier sur les événements du 6 janvier.
Reste qu’en laissant le Président mener son cirque pendant deux mois sans jamais poser des limites à leur soutien, l’écrasante majorité des grands élus républicains ont laissé la situation dégénérer.
Pouvaient-ils l’éviter ? Sans doute : après les prises de position sans ambiguïté, dans la foulée de l’envahissement du Congrès, du vice-Président Mike Pence ou du leader républicain au Congrès Mitch McConnell (qui avaient tous deux louvoyé depuis le 3 novembre), le Président n’a pas pu faire autrement que de reconnaître qu’il laisserait sa place le 20 janvier prochain (on aura noté qu’il n’a toujours pas reconnu la victoire de son adversaire, mais seulement le fait qu’une « nouvelle administration » serait mise en place). Donald Trump ne comprend que le rapport de force mais les républicains n’ont jamais voulu se lancer dans ce jeu-là.
On se souvient que de nombreux républicains expliquaient, pour justifier leur soutien à un Donald Trump qui se déclarait vainqueur de l’élection et criait au « vol », qu’il était légitime de vouloir lever les interrogations sur la sincérité du scrutin avant de valider le résultat ou qu’il fallait laisser au Président sortant le temps de digérer sa défaite et la déception qui allait avec.
Autant d’arguments spécieux qui cachaient surtout la peur de voir le Président lâcher les chiens contre ceux qui auraient osé déclaré qu’il avait perdu et le souci de ne pas s’aliéner, pour les prochaines échéances électorales, la frange des fanatiques parmi les 75 millions d’électeurs ayant déposé un bulletin Trump dans les urnes.
En réalité, les républicains ont un peu trop joué avec le feu : la gestion de l’atterrissage de la croisade menée par le Président sortant pour contester le résultat de l’élection présidentielle leur a totalement échappé pour finir par leur éclater à la figure le 6 janvier.
Plus Trump a pu développer, sans contestation dans son propre camp, ses théories conspirationnistes et irrationnelles sur les fraudes électorales, plus une partie importante des électeurs républicains se sont mis à croire à cette fable (au point que plus de deux tiers des électeurs républicains considèrent encore, selon un sondage de Marist Poll, que le résultat des élections a été faussé), malgré les échecs de tous les opérations menées par le camp Trump pour tenter de faire la preuve de ces soit-disant fraudes.
Dans le même temps, et c’est ce que n’avaient pas anticipé les républicains4L’auteur admet que lui-même pensait que le Président abandonnerait sa croisade inepte après la réunion du collège électoral mi-décembre., la fable absurde selon laquelle Mike Pence ou les élus républicains au Congrès pouvaient « sauver l’Amérique » en donnant la victoire à leur champion, a prospéré, relayé par certains sénateurs et représentants républicains eux-mêmes, certains participant au meeting de Trump le matin du 6 janvier ou exigeant de façon menaçante que Joe Biden « accepte sa défaite ».
De fait, nombre de supporters de Trump y ont vraiment cru : c’est d’ailleurs en partie lorsque les participants au meeting de Trump le 6 janvier ont compris (y compris par l’intermédiaire d’un tweet présidentiel) que Pence n’allait tout simplement pas déclarer Trump vainqueur que la manifestation a dégénéré.
En réalité, plus le temps a passé depuis début novembre, plus il était difficile de s’opposer au Président sans prendre un risque politique important. Les républicains prêts à engager toutes sortes de procédures fallacieuses et vouées à l’échec, que ce soit en justice ou au Congrès, ne s’en cachaient d’ailleurs pas vraiment : un des principaux arguments mis en avant était qu’il fallait bien apporter des réponses à des électeurs qui croyaient sincèrement dans l’insincérité du scrutin, croyance qu’ils avaient pourtant eux-mêmes encouragée mais qu’ils ne se voyaient pas désamorcer eux-mêmes (il aurait fallu pour cela expliquer qu’ils avaient sciemment menti).
Après l’envahissement du Capitole, de nombreux républicains ont enfin dénoncé le Président et définitivement reconnu la victoire de Joe Biden.
Certains ont loué l’attitude de ces « résistants de la 25ième heure », félicitant les quelques sénateurs qui sont finalement revenus au dernier moment sur leur volonté de soutenir les procédures d’opposition à la certification de la victoire de Joe Biden, ou Mitch McConnell dont les deux discours, au moment de lancer le débat au Sénat sur la procédure d’opposition à la certification de la victoire de Biden, puis juste après l’envahissement du Capitole, ont été salués à juste titre pour leur contenu enfin digne de sa fonction de la leader de la majorité au Sénat.
Mais lorsque McConnell déclare que le vote pour refuser la remise en cause de l’élection de Biden était peut-être l’acte le plus important de sa carrière politique, on ne peut s’empêcher qu’il a surtout raté l’opportunité d’être un vrai homme d’Etat lors de sa première intervention publique après le 3 novembre, lorsqu’il a donné la permission au Président Trump de continuer son combat inepte.
De même, la démission de membres du gouvernement pourrait prêter à sourire si le contexte n’était pas aussi grave : entre ceux qui déclarent qu’ils s’en vont parce que Trump aurait dramatiquement changé depuis l’élection du 3 novembre et ceux qui seraient de toute façon partis quelques jours plus tard, on aura du mal à qualifier cela d’actes courageux quand il ne s’agit pour la plupart que de chercher à limiter le préjudice causé par le fait d’avoir participé sans mot dire à la pire présidence de l’histoire des Etats-Unis.
Quant à ceux qui se sont le plus compromis, notamment les sénateurs Ted Cruz (Texas) et Josh Hawley (Missouri), à l’origine des procédures de remise en cause de la certification des élections le 6 janvier, ou Kevin McCarthy, leader californien du groupe républicain à la chambre des représentants, qui a encouragé les élus de son groupe à continuer jusqu’au bout (et même après l’envahissement du Congrès) à contester l’élection, ils ont beau dénoncer la violence, appeler désormais au calme et à l’unité et déclarer la main sur le cœur leur disponibilité pour travailler avec l’administration Biden pour régler les problèmes des américains, ils font face à des critiques virulentes, y compris en interne et les appels à la démission – voire à l’expulsion du Sénat, pour Cruz et Hawley, ce qui est constitutionnellement possible – se multiplient, y compris dans plusieurs influents organes de presse locaux.
Ainsi de nombreuses personnalités républicaines – et pas seulement les derniers cités – voient leur capital politique personnel gravement entamé puisqu’ils sont, peut-être durablement, frappés du sceau de l’infamie pour une grande partie de l’opinion publique américaine, même pour ceux qui affichent désormais leur volonté d’en finir avec Donald Trump (que le lecteur se rassure, on ne les plaindra pas).
Dans le même temps, l’objectif de toutes ces compromissions et de toute cette aventure, à savoir ancrer solidement l’électorat MAGA au parti républicain, en soutenant aveuglement et jusqu’au bout le Président, n’a pas été atteint et nombreux sont les républicains compromis avec Trump qui n’en tireront aucun fruit.
Ces deux derniers mois auront finalement confirmé que le « Trumpisme » n’est pas une idéologie, ou un courant du parti républicain, mais un véritable culte de la personnalité. Certes, Trump a d’abord construit sa victoire en 2016 sur un « programme » (« America First », démantèlement de l’« establishment » politique et administratif de Washington, lutte contre l’immigration, préservation des « valeurs » d’une Amérique blanche et chrétienne, etc.). Mais le vote Trump n’est plus l’expression d’une appartenance politique : c’est désormais pour de nombreux électeurs une « identité »5Pour reprendre l’expression de l’humoriste Jordan Klepper, qui suit les rallyes MAGA depuis plusieurs années..
La gestion par les républicains du phénomène Trump n’est d’ailleurs sans doute pas pour rien dans la création de ce culte de la personnalité incarné par un mouvement MAGA intransigeant et largement incontrôlable.
Après la victoire de Trump en 2016, et malgré toutes les préventions initiales, ils ont cru utile politiquement de ne pas s’opposer à lui, ni même de placer des limites à son comportement – en témoigne le refus d’examiner sérieusement la procédure d’« impeachment » lancée fin 2019 lorsque le Président Trump avait (déjà) essayé de recourir à la menace sur le Président ukrainien pour le pousser à influencer l’élection présidentielle à venir.
De même, à aucun moment les républicains n’ont cherché à empêcher Trump de répandre des contre-vérités, des théories conspirationnistes, etc. Il faut dire que dès avant l’apparition de Trump sur la scène politique en 2015, les républicains avaient depuis longtemps accepté de jouer la carte de la désinformation et du conspirationnisme.
On se souvient par exemple du mouvement « birther » qui mettait en doute le fait que Barack Obama soit né aux Etats-Unis (ce qui est une condition posée par la constitution américaine pour être éligible à la Présidence) ou de l’affaire du consulat de Benghazi (de nombreux républicains ont multiplié les accusations, jamais étayées, selon lesquelles l’administration Obama avaient caché des éléments relatifs à l’attentat contre le consulat ayant coûté la mort à l’ambassadeur américain en Libye, le tout aboutissant à des théories fantaisistes sur le rôle de la CIA, etc.).
Quand Trump (qui était d’ailleurs à l’origine du mouvement « birther ») a utilisé, certes sans commune mesure avec ce qui avait pu se faire avant, ces mêmes méthodes, quand les « talk shows » d’ultra-droite lui ont sans hésiter servi de caisse de résonance, les républicains y ont vu un outil de mobilisation anti-démocrate ultra-puissant, qui remplaçait avantageusement un programme électoral.
Ils n’ont manifestement pas vu arriver que cela mènerait une partie importante de leur électorat à vivre dans un monde imaginaire, dans la fameuse « réalité alternative » pourtant mise en avant dès les premiers jours du mandat Trump (on se souvient des déclarations selon lesquelles la foule présente lors de sa prestation de serment était la plus importante jamais réunie, ce qui était de toutes évidences faux).
La question politique (ou plutôt politicienne) qui se pose pour les républicains est désormais la suivante : combien pèsent réellement ces électeurs et que vont-ils devenir après le départ de Trump de la Maison Blanche ?
Certes, l’avenir politique personnel de Donald Trump paraît compromis, qu’une procédure d’ « impeachment » aboutisse à le rendre définitivement inéligible ou non, par l’« insurrection » du 6 janvier. Celle-ci aura marqué les esprits partout dans le pays, y compris du côté des électeurs républicains « traditionnels », et les sondages montrent une large condamnation des événements et du rôle joué par le Président sortant, dont la popularité est d’ailleurs au plus bas.
Mais cette séquence aura aussi entraîné des réactions fortes d’acteurs importants de la vie politique et médiatique, dans le camp conservateur comme libéral, qui pèseront sur la capacité à rebondir de Donald Trump.
Ainsi, l’association américaine des industries manufacturières a appelé dès le 7 janvier Mike Pence a enclenché le 25ième amendement à la constitution qui permet d’écarter du pouvoir le Président en cas d’incapacité à occuper la fonction, initiant la réaction des milieux économiques, qui s’étaient souvent jusqu’à présent accommodé des errements du Président Trump dans la mesure où son programme économique (dérégulation, baisse de taxes) les satisfaisaient. Les annonces de suspension des financements électoraux de plusieurs grands groupes entrent dans la même logique et sont problématiques pour le clan Trump (même s’il aurait accumulé, plusieurs centaines de millions de dollars de dons depuis le 3 novembre, grâce à des levées de fonds censées financer le « combat »).
Plus anecdotique mais non moins symbolique pour Donald Trump lui-même, deux organisateurs américains de tournois de golfs ont retiré des golfs propriétés de Donald Trump de leur circuit 2021, arguant du risque en matière d’image et de réputation.
Plus gênant encore, la suspension des comptes Twitter et Facebook de Donald Trump le prive d’une audience et d’un mégaphone sur lesquels il a construit sa carrière et son influence politiques6Rien ne l’empêche de tenir des conférences de presse, mais il est tellement plus facile de ne pas avoir à répondre aux interrogations des journalistes…. Le projet de création d’une chaîne de télévision d’ultra-droite dédiée à sa gloire pourrait bien également avoir du plomb dans l’aile tant , au moins aujourd’hui, on voit mal l’écosystème médiatique classique et les diffuseurs se compromettre dans un partenariat.
Mais contrairement à ce que certains républicains ont peut-être cru naïvement, la fin du mandat de Donald Trump le 20 janvier prochain sera loin de marquer le passage immédiat à une nouvelle ère, où le seul héritage du mandat de Trump serait le ralliement au parti républicains des électeurs que Donald Trump avait réussi à mobiliser en 2016 et en encore plus nombre en 2020.
Le « Trumpisme » comme « culte de la personnalité » n’est sans doute pas seulement le fait d’une partie marginale de l’électorat que le parti républicain pourrait choisir d’ignorer en espérant récupérer les modérés partis voir ailleurs en 2018 et en 2020. Un sondage réalisé juste avant l’élection du 3 novembre montre en effet que 54% des électeurs républicains se perçoivent d’abord comme des supporters de Donald Trump, tandis que 38% se déclarent en premier lieu des supporters du parti.
Et en même temps que les supporters du Président sortant se mettaient à vivre dans un monde parallèle (celui où les mexicains sont des violeurs, où les démocrates et les stars de Hollywood gèrent un réseau pédophile, quand ils ne sont pas occupés à empêcher les chrétiens de pratiquer leur religion7Beaucoup ont noté la forte présence de messages chrétiens fondamentalistes dans les émeutes du 6 janvier. ou à préparer l’avènement du Chavisme aux Etats-Unis, etc.), ils épousaient, sans grande surprise, la vision binaire ultra-simpliste du monde de Donald Trump : d’un côté, il y a ceux qui l’aiment et sont prêts à tout pour lui, de l’autre, ceux qui doivent payer (cher) leur absence de soutien ou leurs critiques et qu’ils désignent à la vindicte populaire.
Quand il a bien fallu, pour Pence ou pour certains sénateurs, respecter la Constitution et l’état de droit, et renoncer au soutien du Président, la sanction n’a pas tardé à tomber : dénoncés par Trump, ils sont désormais classés dans la catégorie des « pires ennemis » du Président, accusés de faiblesse et de trahison et harcelés et même physiquement menacés par les « Trumpistes » fanatiques8Certains ont d’ailleurs vu dans la violence des réactions des supporters de Trump envers Pence et d’autres un trait généralement attribué aux mouvements autoritaires, qui consacrent presque davantage de temps et d’énergie à purger leur propre camp des dissidents qu’à attaquer les mouvements adverses..
Mike Pence est désormais honni par les supporters MAGA (certains manifestants ont même scandé « pendez Mike Pence » en envahissant le Congrès), alors qu’il aura été d’une fidélité absolue, malgré une probable indigestion de couleuvres, tout au long de ces 4 ans passés aux côtés du Président, avec l’espoir d’en récolter les fruits lors d’une future candidature présidentielle. Une vidéo du sénateur de Caroline du Sud Lindsay Graham, souvent évoqué dans ces chroniques pour son soutien sans faille et sans vergogne au Président Trump9Par exemple pour son rôle dans la nomination en urgence d’une juge ultra-conservatrice à la Cour Suprême. a marqué les esprits.
Moins médiatisé mais beaucoup plus inquiétant, de nombreux élus républicains à la Chambre des représentants ayant voté pour la certification de l’élection de Joe Biden le 6 janvier ont indiqué avoir l’objet de menaces de mort et craindre pour leur vie et celles de leurs collègues.
Nous avons réalisé que c’était un vote qui nous mettait en danger. Je m’attends à plus de violence politique à l’avenir. Je pense, et j’en ai parlé avec des collègues parlementaires qui essayent eux aussi de voter en leur âme et conscience, que des gens vont essayer de nous tuer.
Peter Meijer, représentant du Michigan, qui a commencé son mandat le 3 janvier dernier et a voté pour la certification de l’élection de Joe Biden le 6 janvier, dans une interview sur CNBC le 11 janvier. Il a voté en faveur de l'”impeachment” le 13 janvier.
Il n’y a donc pas vraiment de place, pour les électeurs MAGA, pour un retour à la réalité, ni pour la demi-mesure ou le compromis entre « trumpiste » et « never-Trumper » et encore moins pour un bilan objectif du mandat de Donald Trump.
Le parti va donc se déchirer dans les mois à venir, avec en perspective les primaires pour les élections de mi-mandat de 2022 (renouvellement total de la chambre des représentants, d’un tiers du Sénat, et de plusieurs postes de gouverneurs… dont la Géorgie) qui promettent déjà d’être particulièrement sanglantes.
D’un côté les «Trumpistes » sincères ou cyniques ne voudront pas dilapider le capital politique du Président, qui représente un atout majeur dans les territoires conservateurs. Il faut dire que dans certains états et encore plus dans certaines circonscriptions, la victoire du candidat intronisé par le parti républicain est garantie ou presque, et l’avenir politique de nombreux élus à la chambre des représentants repose d’abord sur la capacité à gagner la primaire républicaine, pour laquelle la participation de l’électorat « Trumpiste » peut être décisif.
Nombreux sont ceux qui pensent qu’ils peuvent encore surfer sur la popularité du Président et valoriser leur soutien sans faille. Pour les plus ambitieux d’entre eux, il s’agit même d’essayer de bénéficier d’un transfert à leur profit du culte de la personnalité dont bénéficie Trump et peut-être d’un adoubement par Trump dans la perspective de l’élection présidentielle de 2024.
C’est sans doute ce qui explique le premier réflexe, pour le moins malheureux, de 139 représentants et 8 sénateurs, qui ont, juste après l’envahissement du Capitole et malgré l’émotion immédiatement suscitée par les événements, continué à refuser de certifier l’élection de Joe Biden le 6 janvier.
A ce stade, c’est d’ailleurs bien la tendance « Trumpiste » qui prévaut dans les instances du parti : le 8 janvier, les délégations locales du parti républicain ont réélu, quasiment par acclamation, Ronna McDaniel à la tête des instances du parti. Malgré la défaite lors de l’élection présidentielle et la perte de la majorité au Sénat, personne n’a remis celle qui a été installée à son poste par le camp Trump et qui était au premier rang du combat en cause de son action. Tout s’est déroulé comme si Trump avait vocation à être le leader du parti dans les années à venir.
Il faut dire qu’il était peut-être trop tôt pour qu’une contestation s’organise et les fanatiques du Président tiennent en pratique pour l’instant les rênes du parti – et les ressources financières qui vont avec.
De l’autre côté, les tenants d’un « retour à la normale », qui attendent leur heure depuis 2016, plaideront, après les événements récents, l’impossibilité de gagner au niveau national en gardant l’étiquette « Trump » et la nécessité de « sacrifier » l’électorat MAGA pour récupérer les républicains modérés, tenter de consolider le soutien d’une partie de l’électorat issu des minorités, etc.
Il est évidemment impossible de prévoir quelle position prévaudra à court et à moyen terme, d’autant que, sans même envisager que de nouveau des actes de violence soient perpétrés d’ici à la prestation de serment de Joe Biden le 20 janvier, on ne mesure pas encore complètement les retombées politiques des événements du 6 janvier.
Les commissions d’enquêtes sur les événements permettront d’éclaircir le déroulement des événements du 6 janvier, mais aussi le niveau de préparation des « insurgés » et l’éventuelle participation à l’organisation de l’entourage du Président ou de certains élus républicains, par exemple ceux ayant participé au meeting « stop the steal » tenu le matin du 6 janvier ou, etc.
Par ailleurs, les réactions au sein de la société ou de l’écosystème politico-médiatique ne sont que préliminaires. Plusieurs grandes entreprises américaines ont annoncé vouloir arrêter de financer les campagnes de tous les sénateurs et représentants ayant voté contre la certification des résultats le 6 janvier : cela peut-il conduire à une remise en cause globale du financement privé de la politique américaine ? Quelle sera l’attitude à long terme des médias et réseaux sociaux par rapport aux déclarations pro-Trump complotistes, qui font actuellement l’objet d’une surveillance très rapprochée et de mesures immédiates ? Le Président et certains élus républicains peuvent-ils répondre devant la justice (au-delà des mesures de destitution) de leurs discours incitant à l’insurrection ?
Pour autant, les républicains n’ont pas eu le loisir de prendre le temps de mieux évaluer ces retombées avant de commencer à gérer l’après-Trump, puisque la procédure d’« impeachment » lancée par les démocrates les obligés à se positionner à nouveau individuellement et collectivement.
Trump ne les a pas beaucoup aidé les républicains à se dépêtrer de cette situation – qui s’en étonnera ? – puisqu’il a refusé de démissionner ou de se mettre d’une façon ou d’une autre en retrait, ce qui aurait pu désamorcer la procédure d’« impeachment » (qu’il qualifie d’ultime tentative perpétrée par les démocrates qui n’ont jamais voulu reconnaître sa victoire en 2016). Et même s’il a fini le 13 janvier, en plein débat sur l’« impeachment », par diffuser une déclaration appelant ses supporters au calme (sans doute sur l’insistance de ses proches qui craignent des actions en justice à son encontre), reprise ensuite dans une vidéo diffusée par la Maison Blanche10Une vidéo qui, si elle avait été diffusée pendant l’envahissement du Capitole lui aurait peut-être évité d’être le premier Président américain à être subir l’affront d’un deuxième « impeachment »., il n’a pour l’instant affiché aucun remords, assumé aucune responsabilité et il continue à clamer qu’il a gagné l’élection.
Voilà donc les républicains une nouvelle confrontée à un dilemme et forcés de choisir entre deux risques.
D’un côté, celui de s’aliéner définitivement l’électorat pro-Trump et d’exciter encore plus les théories complotistes anti-establishment du mouvement MAGA. Même si la menace du « tweet vengeur » de Trump lui-même ne pèse plus à court terme, son entourage et ses relais d’ultra-droite n’hésitent pas, dès à présent, à désigner les traîtres. Par ailleurs, au-delà des fanatiques du Président, un sondage d’IPSOS réalisé après le 6 janvier montre que seulement 31% des personnes se déclarant affiliées au parti républicain considèrent que le Président Trump porte la responsabilité des émeutes au Capitole.
De l’autre, celui de soutenir une fois de trop le Président sortant, avec les conséquences qui vont avec : pour ne prendre qu’un seul exemple matériel (puisqu’on est à un point où parler de morale pourrait paraître ingénu), les entreprises ayant couper les financements aux élus ayant refusé de certifier l’élection de Biden le 6 janvier pourraient bien appliquer le même raisonnement au vote sur l’ « impeachment ».
Le vote le 13 janvier à la Chambre des représentants a donné de premières indications claires : si une majorité d’orateurs républicains ont dénoncé, lors du débat du 13 janvier sur l’« impeachment », le comportement du Président, seuls 10 républicains à la Chambre des représentants ont finalement choisi de voter pour l’ « impeachment », en défendant courageusement leur position lors du débat ou dans les médias.
Si certains arguments mis en avant pour rejeter l’« impeachment » étaient discutables11Pour ne pas dire hypocrites. (« tout ceci va encore diviser le pays », « si on commence à prendre des mesures contre tous les politiciens qui tiennent des discours virulents en meeting, il ne restera plus grand monde au Congrès »), d’autres étaient plus recevables (précipitation et absence de procédure contradictoire et de respect des droits de la défense, absence de réelle conséquence d’une procédure de destitution engagée à quelques jours de la fin du mandat, exagération du risque de maintenir encore 7 jours en fonction un Donald Trump toujours plus isolé).
Pour autant, et même si parmi eux figurait Liz Cheney, numéro 3 du parti à la Chambre des représentants 12Et fille de Dick Cheney, l’ancien vice-président de George W. Bush., le nombre de républicains ayant voté pour la destitution paraît bien faible au regard de la gravité des actes du Président Trump, ce qui témoigne d’une crainte réelle de répercussions politiques (et peut-être aussi, ce qui est glaçant, des menaces physiques). Les orateurs républicains ne sont d’ailleurs pas pressés à la tribune, avec une quarantaine d’interventions contre plus de 80 pour le parti démocrate.
Dans le même temps, un minorité virulente d’orateurs républicains ont dénoncé l’acharnement des démocrates, qui chercheraient à contester une nouvelle fois la victoire de Donald Trump en 2016, renvoyé dos-à-dos les événements du 6 janvier dernier et les manifestations du mouvement « Black Lives Matter » de l’été dernier, dénoncé le processus électoral, etc. : bref, ils ont maintenu un soutien décomplexé au Président sortant sans jamais laisser entendre que Trump devait rendre des comptes pour son attitude.
C’est d’ailleurs un d’entre eux, Jim Jordan (fidèle du Président qui refuse encore de reconnaître que Joe Biden a été élu de façon régulière) qui avait été désigné chef de file du groupe républicain pour le débat. Et si le leader du groupe républicain Kevin McCarthy a, lui, tenu un discours se démarquant nettement du Président (en dénonçant son attitude avant et pendant l’assaut sur le Capitole, en récusant la fable selon laquelle les « antifas » seraient responsables de l’envahissement et en déclarant sans ambiguïté que Joe Biden a remporté l’élection), cette répartition des rôles et cet équilibre précaire entre les différentes tendances témoigne des tiraillements internes au sein des « congressmen » républicains.
Le positionnement des sénateurs républicains lors du procès, qui interviendra sans aucun doute seulement après la fin effective du mandat de Donald Trump (ce qui n’empêche pas, a priori, de condamner ce dernier et potentiellement de le rendre inéligible) reste très incertain. Un nombre grandissant de républicains (y compris Mitch Mc Connell lui-même) ne ferment pas la porte à un vote en faveur de l’« impeachment », ce qui pourrait marquer la première rupture nette (et non limitée à quelques individualités comme Mitt Romney) et publique d’une partie des républicains avec le Président sortant.
Il faut dire que certains sénateurs d’entre eux ne remettront leur mandat en jeu qu’en 2024 ou en 2026, ce qui leur laisse sans doute plus de marge de manœuvre. Les sénateurs sont par ailleurs élus par l’ensemble de l’électorat d’un état, ce qui les oblige à un positionnement moins radical que des représentants concourant dans des circonscriptions résolument conservatrices.
Evidemment, ces positionnements différents se traduisent pas des tensions internes entre tendances, qui ont déjà largement fuité dans la presse, sur le soutien au Président Trump ou la nécessité de se démarquer des multiples théories conspirationnistes et contre-vérités colportées par le clan Trump depuis des mois. Pour le débat de fond sur un programme politique, on attendra… en se lamentant de voir que le fait de respecter les institutions et le processus électoral est un débat qui doit encore être tranché au sein d’un des deux grands partis américains.
Tout ceci pourraient même à terme remettre en cause l’unité du parti. La sénatrice républicaine de l’Alaska Lisa Murkowski a été la première élue d’envergure nationale à menacer de quitter le parti si celui-ci continuait à faire allégeance à Donald Trump. Et on peut tout à fait imaginer l’apparition en 2022 de candidatures contestant les candidats (qu’ils soient pro-Trump ou anti-Trump) investis par le parti suite aux primaires.
Pour autant, les démocrates auraient tort de se réjouir, même à court terme, des turbulences à venir au sein du parti républicain, qu’ils auront contribué à accentuer en lançant une procédure d’« impeachment ».
Bien sûr, certains observateurs estiment qu’après des soubresauts et des déchirements coûteux en terme de résultats électoraux en 2022 et peut-être en 2024, la page Trump sera plus ou moins tournée, parce que Trump a lui-même 74 ans et parce que tous les candidats à sa succession se font des illusions sur la capacité à reprendre le flambeau. Il sera en effet difficile (même pour la fille ou un des fils de Trump, que ce dernier pourrait être tenté de pousser) de reproduire le mélange de charisme, de propension à la transgression et au mensonge, la capacité à séduire et à satisfaire les bas instincts des adeptes du mouvement MAGA qui caractérisent le Président sortant. On ne transfère pas d’un claquement de doigt un culte de la personnalité.
Ensuite parce qu’il est tout à fait possible que Trump préfère finalement rester le centre de l’attention et laisser planer le doute sur un retour sans jamais laisser d’espace à un héritier. Car en réalité, Trump n’a que faire de son héritage idéologique ou de la permanence du Trumpisme comme mouvement idéologique. Le « Trumpisme sans Trump » ne l’intéresse pas : ce qui l’intéresse, c’est Trump.
Pour autant, le risque d’une radicalisation encore plus importante du parti républicain pour garder à tout prix les électeurs « pro-Trump » est aussi bien réel. Les pessimistes jugent en effet que Donald Trump a montré la voie qui pourrait être empruntée par d’autres personnalités pour rallier un électorat en colère, en proie à la hantise du déclassement et prompts à se raccrocher à des théories du complot « rassurantes » et les élections ont montré combien ces sentiments restaient vivaces et combien la polarisation du pays était forte. Donald Trump est un problème mais aussi un symptôme de maux qui ne disparaîtront pas avec lui.
La fin du mandat Trump, pour chaotique qu’elle puisse paraître, a laissé des points d’appui pour attiser encore la colère du « pays MAGA » qui a trouvé son incarnation en Donald Trump : les « talk shows » d’ultra-droite en font déjà des tonnes sur un « establishment » politique qui aura tout fait pour « avoir la peau » du seul homme politique qui souhaitait défendre les « vrais américains » et qui ne les méprisait pas ; sur les médias, les « Big Tech » Facebook et Twitter et les institutions comme Harvard, qui prennent des mesures radicales pour, selon l’ultra-droite, essayer de tuer le mouvement et entraver la liberté d’expression ou la liberté religieuse des conservateurs, etc.
On voit mal comment un politicien de carrière déjà bien installé pourrait incarner ce discours auprès d’électeurs qui ont goûté au plaisir d’avoir un champion aussi transgressif et hors-normes que Donald Trump, n’en déplaise aux sénateurs Cruz ou Hawley qui n’auront reculé devant rien pour se positionner sur ce créneau13On rappellera que diplômés en droit respectivement de Yale et Harvard, et même ancien collaborateur du président de la Cour Suprême pour Josh Hawley ils n’ont cessé de faire semblant de croire qu’il existait des moyens juridiques et constitutionnels de renverser le scrutin du 3 novembre.. Le mandat Trump aura cependant vu l’émergence de nouveaux élus pour le moins décomplexés dans leur expression, qui pourraient tenter leur chance : on pense ici à Matt Gaetz, élu de Floride et un des plus virulents lors des débats sur l’« impeachment » ou à Kristi Noem, la gouverneure du Dakota du Sud14Connue pour n’avoir pris aucune mesure de lutte contre la propagation du coronavirus, ce qui fait du Dakota du Sud un champion en terme de taux de mortalité mais lui garantit une forte popularité dans la galaxie Trumpiste. D’autant plus qu’elle a offert à Trump une réplique du Mont Rushmore dans laquelle il prend place aux côtés des Présidents George Washington, Thomas Jefferson, Theodore Roosevelt, et Abraham Lincoln..
Surtout, on peut tout à fait imaginer l’émergence d’une personnalité extérieure au monde politique, qui reprendrait le costume de l’ « outsider » et les recettes Trumpienne à base de politique spectacle provocatrice, de désinformation et de dégagisme. Est-ce seulement pour se faire peur que certains stratèges républicains dégoûtés par leur parti évoquent par exemple le scénario d’une investiture de l’affreux Tucker Carlson de Fox News, particulièrement virulent après le vote en faveur de l’ « impeachment » de Trump15L’auteur conseille, même aux plus courageux, de ne s’infliger ses fameux « monologues » qu’à toute petite dose. ? Peut-être, mais il ne faut pas sous-estimer le risque de voir arriver au pouvoir quelqu’un de beaucoup plus intelligent, dogmatique et dangereux que Donald Trump, dont le narcissisme et la paresse auront malgré tout largement limité en partie le pouvoir de nuisance.
Le meilleur moyen de l’éviter est encore pour Joe Biden et son équipe, mais aussi pour les élus démocrates qui tiennent désormais, même avec une marge très courte, tous les pouvoirs législatifs, de réussir dans les deux ans qui viennent.
C’est-à-dire d’en finir du mieux possible avec la pandémie, de redresser l’économie et de lutter contre les inégalités, de remédier au sentiment de déclassement et d’abandon d’une partie croissante de la population, d’apaiser les tensions en maîtrisant les violences politiques et en luttant contre les injustices raciales et contre les policières, et tant qu’à faire de redonner un minimum de confiance dans les institutions et la « politique » au sens noble du terme. Rien que ça.